L’alphabet phonétique : définition et exemples

L’alphabet phonétique international est un système d’écriture qui permet de transcrire tous les sons des langues du monde. Si l’alphabet latin est aujourd’hui l’un des plus utilisés, il ne peut reproduire fidèlement les sons de certaines langues n’utilisant pas les caractères latins, voire pas d’alphabet du tout.

Créé d’abord et avant tout dans un intérêt phonologique, pour étudier les sons des différentes langues, l’alphabet phonétique international s’avère un outil pédagogique essentiel pour lire et assimiler une prononciation, quelle qu’elle soit. Encore faut-il déchiffrer les 107 lettres, les 32 signes diacritiques et la vingtaine d’autres symboles liés à la longueur des syllabes ou à leur intonation…

Malgré son apparente complexité, les avantages d’un tel système sont légion et méritent une petite explication, ne serait-ce que pour vanter la volonté d’universalité et d’inclusion d’une telle initiative.

Qu’est-ce que l’alphabet phonétique international ?

L’alphabet phonétique international (API) est un système de transcription permettant de reproduire à l’aide de signes tous les sons du langage humain. Développé à la fin du XIXe siècle par des linguistes français et britanniques, ce système permet d’attribuer à un seul signe, ou symbole phonétique, un seul son et inversement.

L’alphabet latin, que nous utilisons en français, contient 26 lettres qui doivent représenter les 36 sons du français (pour la variété parisienne uniquement ; le nombre de sons diffère pour chaque variété du français).

Il faut donc associer des lettres pour combler la différence entre le nombre de sons et le nombre de lettres. Pour ce faire, on utilise des digrammes, des suites de deux lettres, ou des trigrammes, de trois lettres, pour représenter graphiquement certains sons.

Exemples de digramme et de trigramme
  • L’association des lettres « c » et « h » forme le digramme « ch », comme dans cheval ou chat ;
  • l’association des lettres « g » et « n » forme le digramme « gn », comme dans montagne ou agneau ;
  • l’association des lettres « o », « i » et « n » forme le trigramme « oin », comme dans foin ou rejoindre ;
  • l’association des lettres « e », « u » et « r » forme le trigramme « eur », comme dans peur ou valeur.

Le mérite de l’alphabet phonétique international est de respecter le principe d’univocité du signe : un son correspond à un seul symbole. Une relation univoque entre le son et le symbole permet de représenter simplement, dans toute leur gamme et amplitude, tous les sons de toutes les langues du monde, même les plus complexes.

Les transcriptions en alphabet phonétique répondent à des conventions précises : elles doivent être écrites entre crochets et reproduire exactement la chaîne parlée, ce qui inclut les liaisons entre les mots.

Autrement dit, si les mots sont prononcés à la suite les uns des autres, la transcription phonétique ne sera qu’une suite de caractère entre crochets, jusqu’à que le locuteur s’arrête pour faire une pause respiratoire.

Le saviez-vous ?
La ponctuation, qui n’est qu’un artifice grammatical, n’a pas sa place dans les transcriptions phonétiques. Seules les interruptions de la chaîne parlée sont marquées par des espaces typographiques et séparent ainsi les sons transcrits entre crochets.

Symboles de l’alphabet phonétique du français

Les crochets qui encadrent les transcriptions phonétiques servent aussi à distinguer les symboles de l’API de ceux de l’alphabet latin, car certains d’entre eux se ressemblent fortement. Les linguistes français et britanniques à l’origine de ce système phonétique se sont évidemment inspirés des caractères latins de leur propre alphabet.

Toutefois, « l’alphabet phonétique français » n’existe pas. L’alphabet phonétique est, par définition, international : il a pour but de reproduire tous les sons, pas uniquement les sons français.

Ainsi, parmi les 160 caractères qui composent l’API, une quarantaine d’entre eux permettent de retranscrire le français. Vous trouverez les 41 symboles phonétiques du français dans les tableaux ci-dessous.

Les sons consonantiques

On appelle son consonantique un son produit par une consonne.

[b] bébé ; abbé
[d] dedans ; addition
[f] fille ; effacer ; phare
[ɡ] goût ; guitare ; jogging
[k] kayak ; caractère ; accord ; qui
[l] luciole ; Lille
[m] moment ; pomme
[n] ninja ; année
[ŋ] footing ; karting
[ɲ] montagne ; signe
[p] pape ; apporter
[ʁ] roue ; nuire ; sur ; enrhumer
 [s] saucisse ; science ; option ; six ; leçon
[t] tu ; toiture ; mettre
[v] vivement ; wagon
[z] zozoter ; poison
[ʒ] jouer ; girafe ; vengeance
[ʃ] cheveu ; schéma ; shampoing

Les sons vocaliques

On appelle son vocalique un son produit par une voyelle.

[a] table ; abracadabra
[ɑ] pâte ; repas
[e] les ; lécher ; nez ; jockey
[ɛ] lait ; mettre ; veste ; exercice ; moyenne
[ə] je ; devenir
[œ] sœur ; immeuble ; un œuf ; jeune ; surf
[ø]  nœud ; heureux ; des œufs ; jne ; foehn
[i]  iris ; île
[o]   beau ; tôt ; autorité
[ɔ] école ; tortue ; rhum ; capharnaüm
[u] cou ; cter ; pouls
[y] rue ; dû
Voyelles nasales
[ã] enfant ; temps ; ambiance ; faon
[ẽ] Lapin ; impôt ; train ; essaim ; moyen ; peintre ;
Reims ; synthèse ; symbole
[ɔ̃] ongle ; ombre
[œ̃] chacun ; parfum
Semi-voyelles
[j] famille ; ail ; voyage ; chien ; pied
[ɥ] huile ; huit ; nuit ; luit
[w] ouate ; oui ; fouet ; web

À ces sons vocaliques et consonantiques s’ajoutent des symboles qui décrivent des éléments suprasegmentaux, autrement dit l’accentuation, les tons et le rythme des syllabes.

Les langues tonales, comme le mandarin, possèdent des tons signifiants, c’est-à-dire que les mêmes sons prononcés avec différents tons auront un sens différent. L’intonation, qui s’applique à la phrase plutôt qu’à la syllabe, ne doit pas être confondue avec le ton d’une syllabe.

L’intonation dépend avant tout de l’état d’esprit du locuteur et du contexte affirmatif, interrogatif ou exclamatif de son message. Aussi, un ton humoristique ou ironique relève du sentiment que le locuteur souhaite communiquer en situation.

Pour le français, qui n’est pas une langue tonale, les éléments suprasegmentaux concernent essentiellement le rythme de la chaîne parlée, notamment la longueur des syllabes.

Les symboles suprasegmentaux

[ː] : ces deux triangles face à face indiquent l’allongement du son qui précède.

ː] père ; caisse ; siège ; entière
[iː] jean ; week-end
[uː] chouette ; cool

[‿] : ce trait courbe unit des sons pour lesquelles une liaison est nécessaire ; il permet de transcrire les associations phonétiques nécessaires ou interdites.

Liaisons nécessaires
[nuz‿avɔ̃] nous avons
[dɘ tãz‿ãtã] de temps en temps
Liaisons interdites
[e ɛ̃si] et ainsi
[œ̃ aʁikɔ] un haricot

[.] : ce point est une coupe syllabique qui indique la segmentation de certains mots.

[pɛ.i] pays
[nɔ.ɛl] nl
[na.if] nf

Quels sont les avantages de l’API ?

Qui n’a jamais rêvé d’un système qui permette de lire et de prononcer toutes les langues du monde, même celle que l’on découvre pour la première fois ? Chacun d’entre nous s’est déjà retrouvé dans une situation où, en employant pourtant le bon mot d’une langue étrangère, notre prononciation ne permettait pas de le rendre intelligible pour notre interlocuteur.

Une véritable maîtrise phonétique

En apprenant tous les signes de l’alphabet phonétique international, la prononciation d’une langue étrangère, surtout celles n’utilisant pas le même système alphabétique, est grandement facilitée.

Certes, il s’agit d’un vaste ensemble ; mais que représente la mémorisation d’un peu plus de 150 signes, comparés aux 5000 idéogrammes du chinois, aux 3000 du japonais et à toutes les langues bantoues, comme le xhosa et d’autres langues à clics, qui possèdent des phénomènes phonétiques particuliers, impossibles à transcrire à l’aide de caractères latins ?

Si l’API était intégré dès la plus tendre enfance, au moment où le cerveau, en formation, est une véritable éponge à savoirs, la reproduction phonétique de toutes les langues du monde serait à notre portée. Bien sûr, seule la pratique en situation permettrait de véritablement maîtriser les différents codes linguistiques, mais la base phonétique serait posée.

Il existe évidemment aujourd’hui des outils pour transcrire simultanément ce que l’on dit dans une autre langue. Les progrès de l’intelligence artificielle dans ce domaine remplacent les transcriptions maladroites que l’on trouve encore dans les guides linguistiques à l’intention des touristes.

Ces transcriptions en caractères latins, qui ne sont pas des plus fidèles, ont toutefois le mérite de proposer, par exemple, des formules de politesse. Il y a fort à parier qu’un merci beaucoup en cantonais à Hong Kong ou en turc à Istanbul est infiniment plus apprécié lorsqu’il sort de votre bouche que prononcé par la voix mécanique et métallique de votre téléphone.

Un code graphique plus transparent

En plus d’apprendre des langues non écrites ou de faciliter nettement l’apprentissage phonétique, l’API offre une graphie transparente à des langues dont l’orthographe est des plus obscurs, comme le français.

Les nombreuses réformes orthographiques qui jalonnent son histoire n’ont jamais réussi à en modifier le code graphique et l’API n’a pas la prétention de réussir là où d’autres ont échoué.

Historiquement, l’orthographe du français a été complexifiée pour en maintenir la non-transparence et, ainsi, en réserver la maîtrise à une élite qui avait le loisir, le temps et l’argent d’en étudier tous les tenants et les aboutissants.

Depuis, le son « o » s’écrit au moyen des trigrammes « eau », « aud » et « aux », mais également des multigrammes « eaux », « haut », « hauts », « eaud » et « eault », et les trigrammes « eim », « ein », « ain » et « aim », ainsi que le multigramme « hein », représentent tous un seul et même son, le [ɛ̃] de fin.

Imaginez maintenant un système graphique qui permette de transcrire, de façon transparente, tous les sons du français, sans ponctuation ni multigrammes, mais bien tel qu’on le parle, grammaticalement correct et phonétiquement fidèle à la réalité des accents régionaux.

Mieux encore, ce système, appris dans son intégralité, permettrait d’acquérir des accents et des langues étrangères, comme si elles ne l’avaient jamais vraiment été. L’alphabet phonétique international est un outil linguistique invariablement politique, dont le caractère universel et démocratique est probablement le premier obstacle à son instauration.

Alphabet phonétique français : exercices
Tous les dictionnaires français, faits en France et à l’attention du public français, proposent une transcription phonétique des mots qu’ils rassemblent. Cette information semble presque incongrue dans la mesure où l’alphabet phonétique international n’est pas enseigné en France et demeure un outil confidentiel.

Cette présence dans les dictionnaires les plus récents révèle néanmoins, à elle seule, la pertinence d’un tel système, linguistiquement parlant, et le gâchis que représente sa méconnaissance. Heureusement, il n’est jamais trop tard pour apprendre, encore moins pour changer ses mauvaises habitudes.

À l’aide des tableaux ci-dessus, vous pouvez apprendre les symboles phonétiques du français et comparer vos transcriptions avec celles du dictionnaire. Une fois l’API du français maîtrisé, rien ne vous empêche d’y ajouter les quelques symboles du système phonétique d’autres langues et d’améliorer enfin cet accent anglais qui vous colle à la peau… de la langue !

Questions fréquentes sur l’alphabet phonétique

Combien y a-t-il de symboles dans l’alphabet phonétique international et dans « l’alphabet phonétique français » ?

Fort de plus de 160 symboles phonétiques, l’alphabet phonétique international permet de transcrire tous les sons des langues du monde. Parmi ces symboles, seule une quarantaine est nécessaire pour retranscrire les sons du français.

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Aude Charrin, MA

Traductrice et linguiste de formation, Aude a également enseigné le français à des jeunes en difficulté scolaire. Sa nouvelle mission : démocratiser la langue française en vulgarisant ses concepts.