Le sonnet (poésie) | Définition & exemples
Le sonnet est un poème composé de quatorze vers, répartis en deux quatrains et deux tercets. Extrêmement codifié, ce format de poème a toutefois vu ses contraintes évoluer au fil des siècles.
Qu’il soit italien d’origine, français de rimes ou élisabéthain de structure, le sonnet n’a pas son pareil pour parler d’amour. Toutes les cours d’Europe se sont laissé séduire par cet incontournable de la poésie romantique.
Table des matières
Qu’est-ce qu’un sonnet ?
Le sonnet, d’origine italienne, est un poème à forme fixe. Issu du latin sonus, « son » en français, puis emprunté à l’italien sonetto signifiant « petite chanson », le sonnet, à ses débuts, se destine à être chanté.
En 1536, Clément Marot, poète français, fait faire à cette forme musicale un voyage transalpin. Il écrit le premier sonnet de la poésie française à Lyon, haut lieu culturel et artistique de l’époque.
La forme alors empruntée est la suivante : quatorze vers réunis en deux quatrains et deux tercets. Le quatrain, strophe de quatre vers, et le tercet, strophe de trois vers, sont alors composés de dix ou douze syllabes. Les deux premières strophes sont toujours des quatrains, mais les deux tercets peuvent parfois être rassemblés en sizain, une strophe de six vers.
Sous l’influence des poètes de l’École de Lyon, la longueur des vers et le format des rimes du sonnet se figent peu à peu. D’abord décasyllabe, le vers devient alexandrin, au milieu du XVIe siècle, sous la plume de Joachim du Bellay, notamment dans le recueil Les Regrets.
Si, à l’origine, les douze syllabes de l’alexandrin ne sont pas une condition requise dans la composition du sonnet, ce format en devient une des caractéristiques principales. Parallèlement à la longueur du vers, le schéma de rimes se stabilise.
Les rimes des deux quatrains sont alors croisées : le premier vers rime avec le dernier, tandis que les vers du milieu riment entre eux sur le modèle ABBA ABBA. Les deux tercets se suivent selon deux schémas de rimes possibles au second tercet.
Sur le modèle du sonnet italien, Clément Marot fait rimer les deux premiers vers des deux tercets entre eux, selon l’enchaînement CCD EED, aussi appelé disposition marotique. Toutefois, au XVIIe siècle, une disposition dite régulière s’impose : la rime du premier vers du second tercet n’est plus suivie, mais croisée, sur le modèle CCD EDE.
Le sonnet sur la forme
D’abord italien, puis français par sa disposition dite régulière, le sonnet s’impose dans les milieux artistiques européens. Dès lors, chaque pays emprunteur lui fait subir une nouvelle variation. En Espagne, dès le XVe siècle, Juan Boscán et Garcilaso de la Vega privilégient un nombre impair de syllabes et transforment les alexandrins en hendécasyllabes, des vers de onze syllabes.
En Angleterre, c’est le format du sonnet que l’on adapte. Il ne comporte plus deux, mais trois quatrains, dont les rimes croisées diffèrent d’ailleurs pour chaque quatrain, suivis d’un distique, une strophe de deux vers, à rimes plates ou suivies sur le modèle ABAB CDCD EFEF GG.
William Shakespeare adopte lui-même cette forme, qui prend alors le nom de sonnet shakespearien ou sonnet élisabéthain, en référence à la reine de l’époque, Élisabeth Iʳᵉ.
Le sonnet élisabéthain a par ailleurs très largement inspiré les poètes symbolistes français, notamment Charles Baudelaire et Stéphane Mallarmé. L’originalité du format, considéré comme plus libre que le sonnet français, correspond à la volonté du symbolisme de produire une écriture non conventionnelle, loin de sa structure d’origine très normée.
Constamment remanié, le sonnet est la forme de poème la plus codifiée, mais paradoxalement, la plus adaptée selon les pays et les époques. Que ce soit dans la construction des strophes ou l’agencement des rimes, chaque poète a vu dans ces quatorze vers un moyen de revendiquer son conservatisme ou, au contraire, son anticonformisme.
Malgré son évolution, le sonnet n’a jamais dérogé aux règles de sa composition textuelle. La richesse des rimes et du vocabulaire, la cohérence entre les strophes, la présence d’une chute au vers final sont autant de contraintes qui font du sonnet la forme la plus emblématique de la poésie française.
Le sonnet sur le fond
En 1674, Boileau dicte non seulement la forme du sonnet, mais également le fond. Si la forme subit des transformations, la composition textuelle du sonnet, elle, n’a jamais enfreint les règles d’origine. Le sonnet lyrique, malgré les différentes adaptations de sa forme, reste le véhicule par excellence du sentiment amoureux.
En effet, le contenu exalté du sonnet correspond autant au lyrisme italien et à son expression enflammée de la passion amoureuse, qu’aux sentiments mélancoliques, voire tragiques, des romantiques français. De Ronsard à Verlaine, la stricte composition du sonnet a toujours parfaitement communiqué l’émotion, aussi funeste qu’intense, des différents courants littéraires.
L’impossibilité de répéter certains mots, notamment les noms communs, contraint les poètes à utiliser un vocabulaire riche, expressif, construit autour des champs lexicaux de l’amour, de la nature et des sentiments, thématiques propres au sonnet et récurrentes dans la tradition poétique.
L’utilisation de l’alexandrin, rythmé par son hémistiche et ses césures, impose au sonnet une musicalité singulière qui renvoie au caractère essentiellement musical du sonetto et à son origine italienne.
L’agencement des strophes, quatrains, tercets ou distique, est soumis à l’obligation d’une cohérence physique et linguistique. Les strophes doivent être indépendantes les unes des autres aussi bien sur la forme que sur le fond. Une même image ne peut se poursuivre sur deux strophes : la rupture physique entre les strophes fait office de rupture sémantique entre les idées exprimées.
Enfin, l’obligation d’une chute, en toute fin de poème, oblige les auteurs à développer une narration dont la fin est brusquement insérée au vers final. Plus la chute est inattendue, plus l’effet de surprise est intense ; l’image n’en est que plus saisissante.
La structure du sonnet donne lieu à un étrange effet de miroir : les strophes paires, les quatrains, s’opposent aux strophes impaires, les tercets. Cette symétrie dans la forme permet sur le fond des contrastes et des parallélismes, à la fois rythmiques et syntaxiques, frappant de perfection.
L’alternance des rimes, croisées pour les quatrains élisabéthains, ou embrassées dans la plus pure tradition lyrique, transforme cette symétrie en harmonie musicale. Les strophes sont autant de partitions sur lesquelles les rimes deviennent des notes à la faveur de la mode française ou transalpine des tercets.
Extrêmement strict, étonnamment musical et étrangement populaire, le sonnet représente le genre poétique dans toute sa pureté et son excellence. D’un lyrisme exacerbé à un traditionalisme méprisé, le sonnet constitue depuis des siècles la clé de voûte de la poésie européenne.
Questions fréquentes sur le sonnet
- Qu’est-ce qu’un sonnet italien ?
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Un sonnet italien est un poème de quatorze vers, dont les rimes sont embrassées dans les deux premiers quatrains (ABBA ABBA), et suivies pour les premiers vers des tercets (CCD EED). Les derniers vers des tercets riment entre eux.
- Quel est le plus beau sonnet en alexandrin sur l’amour ?
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« Mon rêve familier », tiré du recueil Poèmes saturniens de Paul Verlaine, est l’un des plus beaux sonnets en alexandrins sur le thème de l’amour.
- Quel est le plus beau sonnet sur la nature ?
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« Correspondances », tiré du recueil Fleurs du mal de Charles Baudelaire, est l’un des plus beaux sonnets en alexandrins sur le thème de la nature.