Pathos | Définition et exemples
En rhétorique, le pathos (ou Pathos) est un raisonnement fondé sur l’affect et visant à susciter certaines émotions chez le public.
Lors d’un discours, l’expression de sentiments comme la pitié, la sympathie ou la tristesse concourent à créer une complicité émotionnelle entre l’orateur et son auditoire : ce que l’orateur ressent, le public l’éprouve également.
Ce terme, issu de la rhétorique, est surtout utilisé dans la dramaturgie (théâtre et cinéma) ainsi qu’en politique et en publicité.
Les images de personnes grièvement blessées extraites de véhicules accidentés, associées à des témoignages de jeunes paraplégiques ou de familles brisées par la perte d’un être cher, sont violentes et dramatiques.
La volonté de tels messages et de choquer, mais surtout de sensibiliser les usagers de la route au respect des règles dans le bien de tous.
Les sentiments d’empathie et de compassion sont suscités chez le spectateur : tout le monde est conducteur, passager, cycliste ou piéton. L’art du pathos est d’amener le public à s’identifier à ces personnes dont la vie est brisée, à se mettre à leur place.
Le pathos, qu’est-ce que c’est ?
Pathos est un terme grec qui renvoie aux concepts de souffrance, de passion, d’affect et de douleur. Originellement développée par Aristote, la notion de pathos consiste à mettre l’auditoire dans une certaine disposition pour que le discours reçu devienne objet de persuasion. Il s’agit véritablement de susciter des émotions, de véhiculer des valeurs ou des croyances chez le public dans le but de le convaincre.
Si le point de vue aristotélicien s’appliquait dans un premier temps à la rhétorique, « l’art du discours », le procédé du pathos s’affranchit désormais du seul cadre des mots : il peut s’exprimer par des images, de la musique ou le langage corporel.
Les émotions sont constitutives de notre jugement. Si, lors d’une conversation, une personne partage des émotions semblables aux nôtres, elle ne se contente pas de les éprouver, elle les valide, les rend légitimes.
De fait, nous nous sentons immédiatement compris, considéré ; nous jugeons alors positivement cette personne et une certaine complicité s’installe. C’est cette connivence émotionnelle qui renforce la crédibilité du message et en facilite la réception.
Toutefois, le pathos joue grandement avec la corde sensible du public. D’art du discours, il peut rapidement se transformer en art de la manipulation. C’est le cas de bon nombre de discours politiques qui font bien souvent appel à l’émotion plus qu’à la raison.
Ethos, pathos, logos : le trio aristotélicien
Nous devons les trois notions de logos, pathos et ethos, appelées communément triangle rhétorique, au philosophe Aristote, l’un des penseurs grecs les plus influents du monde occidental.
Selon lui, seul l’orateur manipulant habilement ces trois procédés rhétoriques peut soutenir un argumentaire structuré et convaincant, susceptible d’influencer l’opinion du public.
- L’éthos ou l’appel à l’autorité : il s’agit pour l’orateur de mettre en avant son expertise, son statut qui d’emblée permet de rendre son message crédible. La publicité regorge d’exemples du genre : les dentistes qui vantent les vertus d’un dentifrice depuis leur cabinet dentaire, en blouse blanche et entre deux patients. Ses témoignages inspirent confiance parce qu’ils sont apportés par des spécialistes, des experts.
- Le pathos ou l’appel aux émotions : les argumentaires faisant appel au pathos tentent d’influencer le public sur le plan émotionnel en partageant des valeurs et des croyances communes. Le patriotisme, défendu par différents partis politiques, est avant tout un idéal, mais qui répond à des exigences intellectuelles et philosophiques, deux composantes émotionnelles fortes.
- Le logos ou l’appel à la logique : l’argumentaire repose sur des faits avérés, des informations factuelles et précises, des sources crédibles. L’orateur mise sur la capacité de réflexion du public, son raisonnement logique face à des renseignements attestés et authentiques. Un conférencier universitaire s’adressant à ses pairs doit prouver la pertinence de sa recherche par des éléments factuels, et ainsi établir l’irréfutabilité de ses résultats.
Si la recette d’Aristote consiste à trouver le parfait équilibre entre ces trois procédés rhétoriques, ils ne peuvent évidemment pas figurer au sein de chaque argument. Comme dans tout acte de communication, il est primordial de toujours tenir compte du sens du message que l’on souhaite transmettre et surtout de son public cible.
De plus, ce triptyque n’est pas garant d’un bon argumentaire. Certains discours utilisent ces procédés rhétoriques de façon déséquilibrée et malintentionnée. Souvent, l’un est privilégié au détriment des autres : remplacer les preuves irréfutables par des composantes émotionnelles permet de dissimuler une logique défaillante ou une connaissance limitée du sujet. Les arguments sont fallacieux, destinés à tromper, et le raisonnement vicié s’apparente au sophisme.
En se conformant aux normes de rédaction académiques et en appuyant ses arguments sur ses résultats de recherche, l’auteur utilise son statut de chercheur pour valider son argumentaire, tout en l’étayant de preuves concrètes et factuelles qui le rendent crédible.
Puisque tout chercheur se doit de rester objectif, le pathos est complètement absent de ce genre d’écrit : ce procédé ne fait pas appel à la raison, mais à l’émotion, laquelle est intrinsèquement subjective.
Exemples de Pathos
L’appel aux émotions mis en avant dans la notion de pathos permet à l’auteur du message une connivence émotionnelle avec son public. Le discours politique et la publicité ont largement recours à ce procédé rhétorique.
Dans l’exemple ci-dessus, une marque de voiture de luxe fait appel au pathos pour valoriser leur argument de vente : la sécurité. Il est, en effet, impensable de ne pas vouloir assurer la sécurité de ses propres enfants, et ce, à tout prix. L’effet rhétorique est amplifié ici par l’usage d’une question rhétorique, « qui n’attend pas de réponse », tant cette même réponse est évidente.
Le discours sociopolitique n’est pas en reste lorsqu’il s’agit de faire appel aux émotions. Certains enjeux sociaux constituent une excellente occasion d’engager les citoyens dans une démarche commune et un partage des responsabilités.
Par contre, la prochaine fois qu’ils sont en vacances aux Seychelles ou ailleurs, je leur laisse le soin d’expliquer à leurs enfants, qui voulaient absolument nager avec les tortues, pourquoi elles ont disparu de leur habitat naturel, étouffées par les tonnes de plastique qui circulent dans les océans. »
Le discours de ce militant écologiste fait appel aux émotions non seulement du public, mais de tous les publics. Si les plus riches sont d’abord visés, le procédé utilisé permet de dépasser les frontières sociales.
Le fait de devoir avouer à ses enfants sa propre inaction face aux changements climatiques transcende les classes sociales, les positions politiques ou géographiques.
Le procédé rhétorique insiste sur l’idée qu’aux yeux des plus jeunes, nous sommes tous responsables. De plus, l’argumentaire mêle adéquatement le pathos et le logos en introduisant un fait scientifique dans le message pour le légitimer.
Repérer l’appel aux émotions
Certains éléments font office d’indices pour identifier la présence de ce procédé rhétorique au sein des discours.
Des descriptions détaillées
les exemples précis et concrets donnent l’impression d’avoir vécu la même situation, d’avoir ressenti les mêmes émotions.
Un langage imagé
Les images créées par les métaphores et les comparaisons agissent comme un écran sur lequel se projette le public, un miroir qui reflète une réalité partagée. Le lien est au-delà de l’émotionnel, il devient sensoriel.
Un langage connoté
Les mots ne sont plus simplement utilisés dans leur sens premier, leur dénotation, mais pour leur connotation, « la dimension affective, la résonance émotionnelle » qu’ils véhiculent.
Les mots forces de l’ordre, agent de police, gardien de la paix, policier, flic ou keuf sont tous synonymes, mais ne véhiculent pas la même valeur, le même sens affectif. Les mots connotés positivement ou négativement ajoutent une charge émotionnelle au message.
Une communication non verbale et paraverbale
L’expression du visage, les gestes, la posture (communication non verbale) ou le ton de la voix, son volume, le débit des paroles (communication paraverbale) sont des éléments aussi, voire plus, importants que les mots prononcés.
Son rôle est tellement essentiel que les textos et autres SMS, qui sont des conversations orales transcrites graphiquement, pullulent d’émoticônes qui reproduisent le non verbal et le paraverbal manquants. Ces deux types de communication sont alors véhiculés par des sourires, des bouches béantes de surprise, des larmes de tristesse, des sourcils levés d’incompréhension, etc.
Questions fréquentes sur Pathos
- Pourquoi le pathos est essentiel à tout discours de persuasion ?
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Le pathos est une arme de persuasion pour toute production discursive, car elle permet :
- d’établir une connivence émotionnelle forte entre l’orateur et le public. La tristesse ou la compassion sont des ponts affectifs qui font vibrer la corde sensible des auditeurs et permettent une résonance émotionnelle commune ;
- de susciter l’intérêt et retenir l’attention du public. Le partage d’émotions communes augmente le capital sympathie de l’orateur ;
- de concrétiser des notions abstraites, telles que des sentiments ou des ressentis. Ces impressions sont mises en mots dans une narration expressive, faite d’anecdotes et d’histoires de vie.
- Que signifient pathos, ethos, logos ?
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Pathos, ethos, logos sont des procédés rhétoriques qui, selon Aristote, lorsque savamment dosés et employés, sont les bases nécessaires à tout bon argumentaire.
- Le pathos est un appel aux émotions qui vise à convaincre le public par la voie affective et émotionnelle.
- L’ethos est un appel à l’autorité qui fait reposer la crédibilité du message sur le statut, l’expertise de l’orateur.
- Le logos est un appel à la logique qui mise sur la capacité de réflexion, de raisonnement logique de l’auditoire.