Épanadiplose | Définition et exemples

Cette notion — dont le nom ne vous évoquera peut-être pas grand-chose de prime abord — est rarement abordée au collège ou au lycée au moment d’étudier les figures de style, et pourtant…

Fondée sur la reprise du même mot d’un bout à l’autre d’une proposition, l’épanadiplose fait partie de ces figures rhétoriques qui peuvent transformer une expérience de lecture.

Son meilleur atout ? Intelligemment placée, elle contribue grandement à la compréhension et à la mémorisation d’une phrase.

Épanadiplose exemple
La femme peut tout, car elle est la femme.

Explication :

Puisque la phrase ci-dessus reprend le mot femme d’une extrémité à l’autre, elle utilise une épanadiplose.

Épanadiplose : définition

L’épanadiplose est une figure de style qui rentre dans la famille des figures d’insistance, ou de répétition.

Elle consiste à commencer et à terminer une proposition, une phrase (ou un vers en poésie) par le même mot ou groupe de mots.

De cette manière, son utilisation crée un effet de symétrie qui donne une musicalité et un sens particulier à la phrase, laquelle est alors mise en valeur et marque plus facilement celui qui la lit ou l’entend.

Épanadiplose def : exemple
Le pouvoir appelle le pouvoir, et l’argent appelle l’argent.

Explication :

La phrase ci-dessus contient une double épanadiplose.

La présence de ces épanadiploses renforce le ton quasi proverbial du propos et appuie le message qu’elle fait passer, à savoir que le pouvoir et l’argent sont des accomplissements qu’il est vain de poursuivre, puisque leur possession entraîne le fait d’en vouloir toujours plus, engendrant de fait une insatisfaction perpétuelle…

De ce fait, l’épanadiplose est donc autant un instrument stylistique — en particulier rythmique — qu’un outil de persuasion, ce qui en fait une technique d’écriture prisée des auteurs.

Épanadiplose littéraire : exemple
L’enfance sait ce qu’elle veut. Elle veut sortir de l’enfance.

(Jean Cocteau, La Difficulté d’être)

Origine du terme Épanadiplose
L’étymologie du mot Épanadiplose est liée à la langue grecque et résulte du rapprochement de trois termes : epi (« sur »), ana (« de nouveau ») et diploos (« double »).

L’épanadiplose narrative

L’épanadiplose, puisqu’elle repose sur l’utilisation de mots que l’on agence d’une façon particulière au sein de la phrase pour produire un effet de symétrie, s’appuie grandement sur la construction syntaxique de cette dernière.

Néanmoins, l’épanadiplose ne se limite pas à une figure de style en tant que telle.

En effet, son ressort a été calqué et appliqué à une figure de narration employée de façon récurrente dans la littérature et la fiction de manière générale (cinéma, scénario…) : c’est l’épanadiplose narrative.

Épanadiplose narrative exemple
Le film La Haine (1995) réalisé par Mathieu Kassovitz fait usage d’une double épanadiplose narrative :

  • Lorsque le même motif narratif est repris par la voix off qui ouvre et ferme le film, passant de « C’est l’histoire d’un homme qui tombe d’un immeuble de cinquante étages. Le mec, au fur et à mesure de sa chute, il se répète sans cesse pour se rassurer : jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien. Mais l’important, c’est pas la chute. C’est l’atterrissage. » à « C’est l’histoire d’une société qui tombe et qui au fur et à mesure de sa chute se répète sans cesse pour se rassurer : jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien… Le problème ce n’est pas la chute, c’est l’atterrissage. ».
  • Lorsque le film commence avec le personnage de Saïd qui ouvre les yeux, et se termine sur les yeux du même personnage qui se ferment, répétant le même tableau visuel.

Dans les deux cas, la scène de clôture du film fait un clin d’œil manifeste à sa scène d’ouverture.

Cette symétrie d’exposition est possible grâce à la reprise de motifs (narratifs, verbaux, sensoriels…) d’un bout à l’autre de l’œuvre, qui est caractéristique de l’épanadiplose narrative.

L’épanadiplose narrative consiste ainsi à commencer et à terminer une histoire (essentiellement un roman, mais il peut aussi être question d’un poème ou d’une œuvre cinématographique), un chapitre ou un passage à l’aide de la même phrase, du même tableau, de la même idée ou du même motif narratif.

En résulte une impression de cohérence pour le lecteur ou le spectateur, de construction chiadée et de complétude ; c’est le fameux « La boucle est bouclée ».

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Épanadiplose : exemples

Pour compléter notre réflexion et balayer le maximum de cas de figure, voici quelques exemples d’épanadiplose.

Épanadiplose narrative : exemples

La littérature, tous genres et époques confondus, est friande d’épanadiploses. Des auteurs classiques tels que James Joyce (avec Finnegans Wake), Eugène Ionesco (avec La Cantatrice chauve) ou encore Anton Tchekhov (avec Le Sauvage) n’ont pas hésité à l’intégrer à leurs récits. On trouve également des exemples très éloquents chez nos écrivains les plus illustres, à l’instar d’Émile Zola.

Épanadiplose narrative exemple
Dans le roman Germinal, Zola utilise le procédé de l’épanadiplose pour tracer un pont entre son prologue et son épilogue.

En effet, le récit s’ouvre sur un personnage marchant sur une route, seul. Lorsqu’il se clôture, c’est sur ce même personnage, Étienne… qui marche seul sur cette même route.

L’épanadiplose narrative est certes à noter en littérature, mais elle est également très courante au cinéma, dans la mesure où l’aspect plus visuel de cet art la rend particulièrement mémorable.

Épanadiplose narrative exemples
  • Le film Forrest Gump (1994) s’ouvre et se ferme sur un plan montrant une plume qui flotte et tourbillonne dans le vent.
  • Dans Alien : Covenant (2017), le même morceau de musique symphonique débute et clôture le film : L’Entrée des dieux au Walhalla de Wagner.
  • Le thriller policier À couteaux tirés (2019) s’ouvre par un zoom sur une tasse, reconnaissable à l’inscription qui l’orne : « My house, my rules, my coffee ». On retrouve cette même tasse sur le dernier plan du film.
Le saviez-vous ?
Le film français P.R.O.F.S. (1985) débute sur la question « Qu’est-ce qu’une épanadiplose ? » et se termine sur la réponse à cette question. Une belle mise en abyme… qui n’est pas une première pour le réalisateur Robert Schulmann. En effet, la plupart de ses films se terminent par une épanadiplose.

Exemples d’épanadiploses célèbres

Concernant l’épanadiplose en tant que procédé littéraire, les exemples ne manquent pas.

Épanadiplose figure de style
  • Et rose elle a vécu ce que vivent les roses
    (François Malherbe, « Consolation à Monsieur Du Périer »)
  • L’homme est un loup pour l’homme.
    (Thomas Hobbes)
  • Je suis comme je suis.
    (Jacques Prévert, « Je suis comme je suis »)

Mais il n’y a pas toujours besoin d’aller chercher des références aussi pointues : l’épanadiplose se trouve partout autour de nous, jusque dans nos souvenirs d’enfance…

Exemple épanadiplose populaire
Si la comptine pour enfants Alouette nous reste autant dans la tête quand nous l’entendons, c’est peut-être en raison de son épanadiplose particulièrement mémorisable : « Alouette, gentille alouette ! ».

Épanadiplose et anadiplose : en quoi s’opposent-elles ?

Figure de style de répétition, l’anadiplose a les mêmes racines que l’épanadiplose. Pourtant, il ne s’agit pas de la même figure de style, et pour cause : les deux procédés répondent à des règles et à des usages qui s’opposent sur le plan syntaxique.

  • L’épanadiplose consiste à reprendre le même mot ou le même motif au début et à la fin d’une proposition, d’un vers ou d’une phrase.
  • L’anadiplose repose quant à elle sur la répétition du dernier mot ou groupe de mots d’une proposition au début de la proposition suivante.
Épanadiplose anadiplose : exemples
  • Être ou ne pas être.
    (William Shakespeare, Hamlet)

    • Le même mot (Être) est répété d’un bout à l’autre de la même phrase ; c’est donc une épanadiplose.
  • Elle est seule. Seule comme un astre éteint.
    (Nathalie Sarraute, Le Planétarium)

    • Le mot Seule, placé à la fin d’une phrase, débute la phrase suivante (un point les sépare) ; c’est donc une anadiplose.

        Même s’il est toujours question de répétition et de parallélisme entre un segment initial et un segment initial, l’anadiplose n’existe que si elle est répartie sur deux phrases délimitées.

        De la même manière que l’anaphore et l’épiphore, l’épanadiplose et l’anadiplose sont par conséquent aux antipodes l’une de l’autre.

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        Laurine Tihay, BA

        Laurine est titulaire d’une licence de lettres et sciences du langage. Formée à l’enseignement des langues et dotée d’une solide expérience en matière de correction éditoriale, elle est experte en grammaire et syntaxe.